Avis de l’Observatoire sur l’accessibilité des soins kinés trois ans après, où en est-on ?
En 2020, l’Observatoire des maladies chroniques publiait un avis évoquant les améliorations possibles pour l’accès aux soins de kinésithérapie. Cet avis faisait état de certains problèmes rencontrés par les patients malades chroniques ; principalement la difficulté pour trouver un kinésithérapeute spécialisé, le manque de kinésithérapeutes conventionnés ou encore la dureté des conditions pour obtenir plus de séances remboursées.
Pour ceux qui ne le connaitraient pas encore (et c’est encore le cas pour beaucoup de patients malheureusement), l’Observatoire des maladies chroniques est un organe créé au sein de l’INAMI en 2013 pour faire collaborer les organismes assureurs (mutualités) et les coupoles/représentants de patients (VPP, LUSS, PRT) à la création d’avis sur des thématiques transversales touchant la majorité des patients chroniques (accessibilité des soins, transport, E-Santé, etc). Ces avis ont pour but de porter à la connaissance du Ministre fédéral de la santé publique et à toute autorité concernée une série de recommandations pour répondre à cette problématique.
Vous vous en doutez, ces avis ne sont pas contraignants pour les décideurs politiques même s’ils restent des documents officiels et sourcés qui ne peuvent être ignorés par les différentes parties prenantes. Une question vient alors : à quel point les recommandations de ces avis ont-elles d’améliorer les soins de santé au niveau des thématiques évoquées ? C’est la question que nous allons nous poser ici au sujet d’un avis publié en 2020 par l’Observatoire concernant les soins de kinésithérapie (https://www.inami.fgov.be/SiteCollectionDocuments/avis_kinesitherapie.pdf)
Cet avis publié il y a trois ans déjà tirait déjà la sonnette d’alarme sur les problèmes d’accessibilité aux soins de kinésithérapie et formulait donc plusieurs recommandations pour remédier à cette situation. Or, cela fait maintenant plusieurs mois que la LUSS reçoit de plus en plus de signaux d’alerte des patients concernant des problèmes liés à leurs soins de kiné qui semble avoir déjà été abordé dans cet avis de 2020.
Cet article poursuit donc deux objectifs :
1) Attirer l’attention sur le travail trop peu connu de l’Observatoire des maladies chroniques
2) Revenir sur le contenu de l’avis kinésithérapie que nous mettrons en parallèle avec des témoignages et des statistique récente afin de réattirer l’attention du public et des décideurs politiques sur la nécessité de suive les recommandations de cet avis
Manque d’accessibilité des soins de kinésithérapie : mêmes constats trois ans après ?
Contrairement à ce qu’on pourrait penser d’un document visant à réclamer un meilleur accès à un certain type de soins de santé, l’avis de l’Observatoire ne fait pas que dresser un portrait sombre de la situation et encore moins à charge des kinésithérapeutes. Il a même veillé à commencer sur une note positive en rappelant :
– Que les patients ont généralement une très bonne relation avec leur kinésithérapeute qui prend souvent en considération la situation financière, parfois difficile, du patient
– Que le travail des kinésithérapeute est une partie importante du travail de 1ère ligne autour des patients malades chroniques étant donné qu’ils constatent l’évolution de l’état du patient
– Que des remboursements et une offre de remboursement spécifique existent pour certaines pathologies/conditions médicales demandant plus de séances : Statuts E et F pour les pathologies lourdes
Partant de ce constat positif et constructif pour la relation patient-kinésithérapeute, l’avis mettait ensuite en lumière des points d’améliorations possibles en ce basant sur des témoignages patients, des rapports officiels et une enquête menée par la VPP, à savoir :
1. Il y a un manque de kinésithérapeutes conventionnés
Rappelons qu’au moment de la publication de l’avis en 2020, le taux de conventionnement des kinésithérapeutes était d’environ 82 % en se basant sur les chiffres de 2019 alors qu’il était de 95 % en 2016. Au moment d’écrire cet article, ce taux est descendu à 69,97% en 2023. Ce qui veut dire qu’il y a eu une chute 30 % de conventionnement chez les kinés sur les 7 dernières années !!
2. L’information autour du conventionnement des kinésithérapeutes n’est pas assez claire
L’avis mobilise des témoignages qui font état de la mauvaise information des patients quand au statut de conventionnement de leur kinésithérapeute et rappelait que la convention imposent aux kinésithérapeutes d’indiquer qu’ils sont conventionnés via une affiche dans leur salle d’attente ou, à défaut, sur leur site internet. La LUSS a reçu des témoignages indiquant que des kinésithérapeutes qui ont décidé de se déconventionner n’en ont pas directement informé (ou pas assez clairement) leurs patients qui s’en sont rendu compte avec l’augmentation de leurs factures.
3. Il est nécessaire de continuer développer les statuts E et F (pathologies lourdes)
On le sait, le système de remboursement de kiné en Belgique est structuré selon un système de statuts dans lequel le patient est censé pouvoir trouver une réponse efficiente à ses besoins en kinésithérapie. Cela se traduit donc par le régime ordinaire qui permet à tout patient d’avoir 18 séances de kinésithérapie remboursées par an, le statut E pour les pathologies lourdes permettant d’obtenir jusqu’à une séance de kiné remboursée par jour pour des pathologies spécifique et enfin, le statut F pour les affections chroniques aigues qui permet d’obtenir 60 séances remboursées à 100 % et une addition 20 séances remboursées (si nécessaire) partiellement par an.
Si l’Observatoire des maladies chroniques reconnaît que ce système de remboursement permet de repartir de manière efficiente la masse de séances de kinésithérapie disponible selon les besoins, l’avis rappelle que les statuts restent très restrictifs et excluent des pathologies qui nécessiteraient aussi des séances de kinés supplémentaires. De plus, les dernières législatures avaient vu un recul dans les remboursements des séances pour certaines catégories de patients qui rentraient déjà dans les statuts E et F. L’avis donne d’ailleurs l’exemple médiatisé des patients fibromyalgiques qui étaient passé du statut F au régime ordinaire diminuant ainsi drastiquement leur nombre de séances remboursées à l’année suite après décision de l’exécutif mais ont pu inverser la décision au Conseil d’Etat pour retourner dans le statut F.
Pour ce deuxième point, des efforts semblent avoir été fournis sous la législature actuelle. Nous prenons pour exemple le cas des parents d’enfants infirmes moteurs cérébraux avaient vu le nombre de séances remboursées diminuer d’une séance par jour à un maximum de 150 séances par an (chiffres basés sur les témoignages envoyés par des parents concernés à la LUSS) en 2020. En 2022, l’exécutif a accepté d’inverser la décision pour revenir à la situation d’origine permettant aux enfants IMC d’avoir à nouveau droit à une séance de kiné remboursée par jour.
4. Il y a un manque de communication basique entre le kiné et les autres dispensateurs de soins de la 1ère ligne
Comme nous l’avons rappelé dans l’introduction de cet article, les kinés sont des membres cruciaux de la 1ère ligne puisqu’ils sont régulièrement en présence du patient (et encore plus des patients chroniques). Ils sont donc idéalement positionné dans le trajet de soins pour constater l’évolution du patient dans sa pathologie ou son traitement. C’est pourquoi l’avis mettait aussi en avant qu’une bonne communication entre les kinés et les autres de dispensateurs de soins du patient (surtout de 1ère ligne) est cruciale.
De l’avis des patients que la LUSS a pu consulter sur la question des soins kinés, il semble que ce manque de communication soit toujours ressenti chez les patients qui regrettent que les observations du kiné n’arrive généralement pas aux oreilles du médecin traitant. Il y a donc encore du travail à ce niveau.
5. Il y a trop peu d’offre de soins kinésithérapeutes pour les patients « maladie rare » (à retravailler)
Lorsqu’on évoque la thématique de l’accessibilité aux soins, il est indispensable de réfléchir en termes de besoin pour les différents type de patients qui n’ont pas tous besoin des mêmes soins et ont même parfois besoin de soins très spécifiques. C’est particulièrement le cas des patients souffrant d’une maladie rare (le définir en note de page) pour qui ces soins spécifiques sont très difficilement accessibles.
Pour cette raison, l’Observatoire a également tenu à évoquer les difficultés qu’ont les patients maladies rares à trouver un kinésithérapeute compétent pour leur pathologie. (voir avec Martine pour témoignages ou précisions)
Un autre problème que l’on peut évoquer est le manque de flexibilité pour les soins donné dans centres de références ou spécialisés. Ces centres permettent en effet pour les patients maladies rare pouvant se rattacher à un de ces centres via une convention leur permettant d’obtenir des soins kinés répondant généralement à leurs besoins. Ces centres présentent des avantages et des inconvénients qui seront débattus dans un prochain avis de l’Observatoire.
Un de ces plus gros inconvénients se trouvent être l’éloignement géographique de ces centres par rapport aux patients qui peuvent parfois habiter à l’opposé du centre les obligeant à faire une longue route. De ce fait, certains patients s’étonnent qu’un système de financement spécifique ne soit pas accordé aux patients pour ces déplacements qu’ils ne peuvent parfois pas effectuer eux-mêmes.
Avis encore d’actualité portant des recommandations toujours pertinentes
Vous l’aurez sans doute compris à la lecture de cet article, beaucoup de problèmes soulevés dans l’avis de l’Observatoire publié il y a trois ans sont encore d’actualités. C’est pourquoi la LUSS a voulu rédiger cet article pour remettre ce dernier en lumière à un des élections.
Alors que faire maintenant ? D’abord, vous invitez à retourner au matériau de base en lisant vous-même l’Avis de 2020 qui, en plus de porter des constats vérifier par les chiffres et les témoignages des associations de patients, proposait des recommandations tout à fait pertinentes. On peut citer :
– Une info claire et accessible sur les soins et leur financement à destination de tous les patients
– Un meilleur alignement des traitements actuels avec des preuves scientifiques d’efficacité
– Une application généralisée du système de tiers payant (à rendre obligatoire pour les patients bénéficiant du statut maladie chronique ou du statut BIM)
Il nous reste également à souligner les efforts faits sous cette législature pour tenter de rendre les soins de kinés plus accessible malgré les résultats mitigés du dernier modèle de conventionnement.
Pour finir, nous tenions à vous rappeler que la LUSS fait activement part de ces différents problèmes au sein des mandats administratifs occupés par les différents collaborateurs et patients.