Les droits du patient passés à la loupe

Bernadette Pirsoul, Thierry Monin Chargés de projets à la LUSS

Voici le cinquième épisode de cette série consacrée aux droits du patients tels que définis dans la loi de 2002.
Loi qui sera bientôt soumise à une modernisation lancée par le ministre de la Santé publique, Frank Vandenbroucke. La LUSS ne manquera évidemment pas de commenter la nouvelle mouture, à laquelle elle a pu contribuer, dans les colonnes du Chaînon.
Cet épisode sera consacré au droit de plainte, qui est défini dans la loi de 2002 relative aux droits du patient ainsi que dans la loi de 2019 relative à la pratique des soins de santé.

Loi relative aux droits du patient, article 11

Nous aborderons dans cet article principalement la médiation dans les hôpitaux.
Par ailleurs, pour ce qui concerne le secteur extrahospitalier, il est possible pour le patient de s’adresser au service de médiation fédéral droits du patient. Celui-ci traite des plaintes qui concernent un professionnel du secteur ambulatoire travaillant en dehors d’un hôpital (par exemple, médecin généraliste, infirmière indépendante, médecin coordinateur au sein d’une maison de repos…).
Les coordonnées sont reprises en fin d’article.

En quoi consiste la médiation ?

Dès qu’une plainte est introduite par écrit ou oralement par un patient, le médiateur intervient pour tenter de rétablir la communication entre le patient et le professionnel. L’objectif est de trouver une solution au différend qui les oppose.

Le médiateur entend les parties afin d’avoir une vue d’ensemble de la situation. Tout au long de la procédure, le médiateur doit faire preuve de neutralité et d’impartialité.
Le médiateur peut proposer une rencontre en sa présence afin de renouer le dialogue. Le patient peut être assisté d’une personne de confiance.

En cas de refus de rencontre, le médiateur sert de relais entre le patient et le professionnel et vise à ce que chaque partie puisse exprimer son point de vue et formuler des propositions.
Si le différend subsiste, le médiateur oriente le patient vers d’autre procédures possibles pour le traitement de sa plainte, procédures de médiation ou généralement pour trancher le litige.

La fonction de médiation en milieu hospitalier

L’arrêté royal qui porte sur la fonction de médiation date de 2003. Il impose au médiateur d’être titulaire d’un diplôme de l’enseignement supérieur de type court. Rien n’est prévu concernant une éventuelle obligation d’être formé en matière de médiation, en matière de formation continue, d’accompagnement des médiateurs.

Le médiateur est tenu au secret professionnel.
Il doit faire preuve de neutralité et d’impartialité tout au long de la procédure.

L’hôpital (ou le groupement d’hôpitaux) a certaines obligations concernant la fonction de médiation :

  • Informer le public pour que le service de médiation soit accessible.
  • Veiller à ce que le médiateur puisse entrer en contact librement avec toutes les personnes concernées par la plainte.
  • Veiller à ce que le processus de médiation aboutisse dans des délais raisonnables.
  • Veiller à ce que le médiateur dispose des moyens (secrétariat, locaux, communication, logistiques….) pour mener ses missions.

Qui traite les plaintes ?

Le médiateur hospitalier est compétent pour traiter des plaintes qui visent un professionnel des soins de santé qui travaille dans un hôpital.
Lorsque ce professionnel exerce dans un hôpital psychiatrique, une initiative d’habitation protégée ou encore une maison de soins psychiatriques, le médiateur compétent peut être celui d’une plate-forme de concertation en santé mentale
à laquelle les institutions sont rattachées.
Le service de médiation fédéral « droits du patient » traite les plaintes qui concernent un professionnel des soins de santé du secteur ambulatoire travaillant en dehors d’un hôpital.

Les coordonnées de ces services sont disponibles sur le site Internet de l’hôpital concerné et sur le site du SPF Santé publique (voir rubrique coordonnées en fin d’article).

Ce que défend la LUSS

La LUSS recommande de développer et de renforcer l’information sur la fonction du médiateur :

  • que peut-on attendre d’une médiation ?
  • quelles sont ses limites d’action ?
  • quelles sont les autres procédures de recours possibles pour le patient ?
  • comment entrer en contact avec le service de médiation ?

La LUSS estime essentiel de renforcer la neutralité et l’indépendance des services de médiation par une externalisation de ces services hors des hôpitaux sur une base géographique.

La LUSS considère qu’un délai de réponse devrait être imposé aux médiateurs en cas de plainte.

Un effort doit être porté à l’accessibilité physique des services de médiation hospitaliers.

Les médiateurs hospitaliers doivent disposer des moyens suffisants pour remplir leurs missions (il en est de même pour le service de médiation fédéral droits du patient qui doit pouvoir offrir un service de proximité).

D’autres recours existent…

Outre la médiation dans le cadre de la loi relative aux droits du patient, il existe d’autres possibilités de déposer une plainte tels que par exemple l’Ordre des médecins, un recours en Justice et tout récemment la Commission de contrôle de la pratique des soins de santé.

Ces procédures ne relèvent plus de la médiation, mais s’articulent sur une logique de sanction ou de contrôle vis-à-vis du professionnel.

Le droit de plainte dans le cadre de la loi relative à la pratique des soins de santé

En mai 2019 était publiée au Moniteur Belge la loi relative à la qualité de la pratique des soins de santé.
Cette loi a pour objectif de créer un cadre législatif cohérent permettant d’assurer la qualité et la sécurité des prestations des praticiens des soins de santé.
Les praticiens des soins de santé doivent respecter ces exigences de qualité lorsqu’ils dispensent des soins de santé au patient.

Les exigences à respecter par le praticien des soins de santé pour garantir la qualité des prestations
de soins sont liées aux éléments suivants7 :
1. la liberté diagnostique et thérapeutique;
2. la compétence du praticien des soins de santé et l’obligation de disposer d’un visa;
3. la caractérisation du patient et la prestation avec l’obligation de réaliser certaines prestations en milieu hospitalier;
4. l’encadrement des prestations;
5. des conditions spécifiques à respecter si une prestation est accomplie sous anxiolyse ou anesthésie;
6. la garantie de la continuité à assurer;
7. l’assurance de la permanence à assurer;
8. la prescription de médicaments/produits de santé, la prescription de renvoi et la prescription de groupe;
9. les conditions auxquelles il est permis de diffuser des d’informations professionnelles;
10. la structure et l’organisation de la pratique individuelle et des associations entre praticiens des soins de santé;
11. la complétude du dossier de patient;
12. les principes régissant l’accès par un professionnel de la santé aux informations tenues à jour par un autre professionnel de la santé pour un patient déterminé;
13. le peer review (évaluation par les pairs);
14. la notification obligatoire de la pratique auprès d’un registre des pratiques.

Cette loi a également instauré la Commission fédérale de contrôle de la pratique des soins de santé (avec une Chambre multidisciplinaire d’expression française et une Chambre multidisciplinaire d’expression néerlandaise).
Les Chambres sont composées d’un représentant de onze catégories de professionnels des soins de santé et d’un représentant des patients (via la LUSS et la VPP). Un suppléant est prévu pour chaque membre. Les membres sont tenus au secret professionnel.

De quelle manière le contrôle s’effectue-t-il ?

La Commission de contrôle peut exécuter sa mission de la façon suivante :
1° par un contrôle systématique ;
2° par un contrôle ad hoc :
a) à la suite d’une plainte ;
b) sur initiative propre ;
c) à la demande du ministre.

La Commission dispose d’un service d’inspection pour instruire les dossiers et les plaintes reçues de patients ou transmises par d’autres administrations.
Elle peut prendre à l’égard du professionnel des soins de santé (sur base d’un rapport du service d’inspection et après une audition préalable) une série de mesures comme par exemple un plan d’amélioration, suspension ou retrait du visa
Les Chambres commençant à traiter les dossiers, il faudra quelques mois avant d’avoir une idée plus précise de la manière dont elle analyse et traite les plaintes (à travers le rapport annuel).

Il ne s’agit donc pas ici de régler un différend entre un professionnel et un patient mais d’analyser si la pratique et le comportement du professionnel sont en adéquation avec les exigences de la loi.

Coordonnées

Plate-forme de concertation en santé mentale :
www.health.belgium.be/fr/les-services-de-mediation-dans-les-hopitaux-et-des-plates-formes-de-concertation-en-sante-mentale

Service de médiation fédéral droits du patient :
www.health.belgium.be/fr/le-service-de-mediation-federal-droits-du-patient

Pour déposer plainte auprès de la Commission fédérale de contrôle de la pratique des soins de santé :
Envoyez votre plainte par courriel : controle-toezicht@health.fgov.be
Ou par courrier postal :
Commission fédérale de contrôle, A l’attention du président
Avenue Galilée 5/2 – 1210 Bruxelles
Un accusé de réception sera envoyé de manière systématique. Il n’y aura pas de guichet physique pour accueillir les plaintes.