Reprendre le travail avec des aménagements raisonnables
Thierry Monin
Chargé de projets à la LUSS
Lorsque l’on souffre d’une maladie chronique ou que l’on se trouve en situation de handicap, on peut malgré tout souhaiter reprendre une activité professionnelle durable.
Ceci nécessite toutefois d’examiner dans quelle mesure le travailleur peut reprendre l’emploi qu’il exerçait avant d’être en incapacité de travail. L’état de santé ne permet pas toujours de pouvoir reprendre le travail dans les mêmes conditions, avec le même rythme et la même intensité.
Le législateur fédéral a mis en place une réglementation prévoyant des dispositifs pour accompagner le travailleur (sous contrat ou non) dans un trajet vers un une réintégration ou un retour ou dans un emploi.
Trajet de réintégration
Le trajet de réintégration vise à promouvoir la réintégration du travailleur en incapacité de travail, en principe dans l’entreprise mais d’autres solutions peuvent être envisagées comme un emploi dans une autre entreprise moyennant une formation.
Trajet retour au travail
Le trajet retour au travail a pour but de soutenir le plus rapidement possible le titulaire reconnu incapable de travailler en mettant en place un accompagnement adapté en vue de l’exercice d’un emploi correspondant à ses possibilités et ses besoins sous la coordination du « Coordinateur Retour Au Travail ». Ceci peut intervenir après renvoi par le médecin-conseil de la mutualité sur la base d’une évaluation des capacités restantes du titulaire ou à la demande de ce dernier.
C’est donc un trajet axé sur un retour sur le marché du travail : via un travail adapté, un autre travail ou une formation.
Pour que ces trajets puissent mener à des résultats concrets, des mesures d’encadrement et de soutien sont nécessaires : jobcoachs, aides matérielles ou financières pour le travailleur et/ou l’employeur.
Des aménagements raisonnables
Ceci nécessite donc de mettre en place des aménagements raisonnables (source UNIA : tinyurl.com/unia-amenagements).
Il s’agit donc d’envisager avec les personnes concernées (le travailleur, l’employeur, le médecin du travail, l’AVIQ…) l’adaptation du poste de travail, l’organisation et les conditions de travail à la situation nouvelle du travailleur. Cela nécessite des réponses spécifiques à chaque situation.
Les obstacles/difficultés à la mise en œuvre d’aménagements raisonnables
L’objectif d’accompagner le travailleur vers l’emploi peut rencontrer une série d’obstacles comme :
- les aménagements nécessaires pour réintégrer le travailleur sont manifestement déraisonnables : coût financier trop important compte tenu de la taille de l’entreprise, l’impact sur l’organisation du travail. À l’inverse, on pourrait considérer comme abusif le refus de l’employeur de procéder à un aménagement raisonnable qui pourrait profiter à d’autres travailleurs, ou pour lequel il n’y a pas de réelle alternative ou bien encore lorsque l’employeur n’a pas respecté les normes de prévention ou d’accessibilité.
- La fonction ne s’y prête pas : la réintégration ou le retour au travail dans une fonction déterminée peut ne pas être possible. Dans le cadre du trajet, il faudra examiner si un emploi dans une autre fonction ou un autre environnement n’est pas envisageable.
- D’autres arguments peuvent être invoqués par l’employeur pour refuser tout aménagement et donc toute réintégration : les craintes et réticences de collègues, la lourdeur administrative et la charge de travail y liée, la perte de productivité du travailleur.
Mais des solutions et des aides existent !
Les travailleurs en situation de handicap (y compris les patients atteints d’une pathologie chronique) et les employeurs peuvent bénéficier d’aides matérielles ou financières dans le cadre d’un trajet de réintégration ou de retour au travail. Une demande est à introduire auprès des services régionaux compétents : l’AVIQ (Agence pour une Vie de qualité en Wallonie) ou le Phare et/ou ACTIRIS en fonction du type d’aide demandée en Région bruxelloise.
Par exemple, en Wallonie, l’AVIQ propose comme mesures de soutien :
- des stages de découverte en entreprise ;
- un contrat d’adaptation professionnelle ;
- des primes pour favoriser l’embauche : prime à l’intégration, prime au tutorat, prime aux indépendants ;
- des primes pour maintenir à l’emploi : prime de compensation, aménagement du poste de travail.
Quelques recommandations/balises de la LUSS en matière d’aménagements raisonnables :
1. L’importance de la prévention : sécurité au travail, amélioration de l’environnement de travail…
2. Adapter les conditions de travail et la culture de l’emploi – favoriser un management adapté et inclusif – sensibiliser et accompagner les équipes pour permettre une réintégration durable du travailleur (risque de lassitude des collègues, éviter les discriminations…)
3. Une politique proactive en matière d’aménagement des postes de travail et d’adaptation des conditions et des horaires de travail, en renforçant les collaborations existantes avec les services régionaux compétents en matière d’aide à l’emploi.
4. Le trajet retour au travail est un outil pour permettre à la personne de reprendre une activité professionnelle adapté à sa situation particulière.